On a reproduit ici, notamment pour combler les lacunes du journal Le Monde signalées précédemment, le chapitre de l’ouvrage L’Etat et les fonctionnaires concernant le minimum vital, le budget type et le salaire minimum.
Voici un autre extrait de la partie de l’ouvrage traitant l’élaboration du nouveau système des rémunérations dans le cadre du Statut général des fonctionnaires adopté en 1946.
Les principes généraux du nouveau système des rémunérations
Selon la doctrine, les fonctionnaires perçoivent un « traitement », et les militaires une « solde » et non pas un « salaire ». Mais la qualité de salariés des fonctionnaires est une réalité économique et sociale. L’interprétation de nombreux auteurs estimant que le traitement des fonctionnaires était essentiellement un versement destiné à leur permettre de mener un train de vie en rapport avec la dignité de leurs fonctions, relève dans une large mesure des temps anciens.
Le statut général des fonctionnaires fixait le cadre juridique du système des rémunérations. Les articles 31 à 37 regroupés sous le titre III intitulé « Rémunération » comprennent trois séries de dispositions concernant respectivement la définition des éléments composant la rémunération, la détermination de la base des traitements par référence à un minimum vital, et l’affirmation du principe du classement général des emplois de l’Etat
Comme tout salarié, le fonctionnaire doit recevoir une rémunération correspondant au travail qu’il accomplit. Mais dans son cas, il s’agit d’une garantie fondamentale. Il ne peut en effet être admis qu’un service accompli par un agent de l’Etat soit directement rémunéré par l’usager, et le droit à rémunération implique une vérification du « service fait » par l’ordonnateur et le comptable. Les traitements publics bénéficient de l’insaisissabilité et de l’incessibilité des salaires dans les proportions fixées par l’article R. 145-1 du code du travail. L’insaisissabilité s’oppose à l’Etat, et en cas de privation illégitime du traitement, le fonctionnaire a droit au paiement des intérêts légaux à compter de la date de la réclamation à l’autorité compétente. Comme toutes les dettes de collectivités publiques, les traitements relèvent de la déchéance quadriennale
La règle du « service fait » est une règle très ancienne de la comptabilité publique qui date aujourd’hui d’un siècle et demi (décret du 31 mai 1862) d’où il résulte d’une part que seule l’installation et non la nomination entraîne le droit au traitement, et d’autre part que ce dernier ne peut être payé qu’à terme échu. (Elle sera explicitement mentionnée dans l’Ordonnance du 4 février 1959 refondant le statut général des fonctionnaires, alors qu’elle ne l’était pas dans le statut de 1946).
Cette notion fera l’objet d’une assez abondante jurisprudence du Conseil d’Etat, et aura des applications importantes dans le domaine des retenues pour fait de grève sur lesquelles nous reviendrons. De même pour les évolutions de chacune des composantes de la rémunération dont l’énumération énoncée par le Statut général des fonctionnaires de 1946 est une constante dans les versions ultérieures de ce document fondamental