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13 mars 2011 7 13 /03 /mars /2011 08:56

         Voici la troisième et dernière partie du texte de Maurice Thorez dont les deux premières ont été insérées ici.

 

                                                                        III

 

                                                 Le Statut

 

   C’est le 27 mars 1946 que fut soumis à la Commission syndicale  le Statut, élaboré en moins de quatre mois, alors que depuis un demi-siècle, aucun ministre, aucun gouvernement, n’avait été en mesure d’effectuer ce travail. Le statut, après une étude approfondie, obtint l’accord complet de tous les représentants des organisations de fonctionnaires, confédérés et chrétiens, ainsi que ceux de la Fédération Postale confédérée.

   Le Statut fut également soumis à l’appréciation de la  Commission supérieure de la fonction publique et au Conseil d’Etat. Des modifications furent introduites dans le projet initial, des concessions consenties, des solutions transactionnelles acceptées, dès lors qu’elles n’altéraient pas l’esprit général du texte, esprit profondément démocratique et respectant, à la fois les exigences du service et les intérêts légitimes des travailleurs de la Fonction Publique.

   C’est dans ces conditions que le projet de Statut avait été déposé dès le 19 avril 1946 sur le bureau de la première Assemblée  Nationale Constituante, qui ne put le voter avant la séparation.

   Certains, par des manœuvres dilatoires, s’efforcèrent encore une fois d’empêcher le vote du projet par la deuxième Assemblée Constituante. Ces vaines tentatives furent déjouées. L’Assemblée  Nationale adopta le Statut à l’unanimité, faisant litière des calomnies des feuilles réactionnaires, reprises, hélas ! à la tribune par le porte - parole du Parti Socialiste, qui osa parler de l’esprit « totalitaire » d’une loi essentiellement démocratique qui fait honneur à notre pays.

   Quelles sont les dispositions essentielles du Statut ?

 

1° Le Statut prévoit la participation étroite des syndicats de fonctionnaires à la gestion du personnel et aux questions d’organisation et de technique par le moyen d’organismes paritaires de deux sortes : les Commissions Administratives et les Comités techniques. Le Statut confère un caractère légal et organique à cette participation. Il apporte dès lors la reconnaissance formelle et intégrale du droit syndical des fonctionnaires.

2° Le Statut pose en matière de recrutement, et surtout en matière d’avancement et de discipline, des principes relativement nouveaux. L’avancement d’échelon se fait à l’ancienneté, avec des dispositions l’accélérant ou le retardant. L’avancement de grade a lieu au choix. L’intervention des Commissions administratives et le recours éventuel auprès du Conseil supérieur de la fonction publique, également formé sur une base paritaire, écarteront tout risque d’arbitraire de la part du chef de service. Les notes chiffrées, pour lesquelles intervient une péréquation générale, sont portées à la connaissance de l’intéressé : ce qui était une possibilité devient un droit. L’appréciation générale sur un fonctionnaire est portée à la connaissance de la Commission administrative. L’intéressé en reçoit communication sur sa demande adressée à la Commission administrative. Le dossier du fonctionnaire ne doit contenir aucune indication se rapportant à ses opinions politiques, philosophiques ou religieuses.

3° Le Statut donne aux fonctionnaires la possibilité de contribuer dans une large mesure à la correction des défauts actuels  de notre administration et lui rendra son efficacité, parce qu’il permettra de promouvoir à la tête des différents services et aux postes les plus importants, des agents d’une valeur éprouvée, ayant le goût de l’initiative et le sens de la responsabilité.

4° Le Statut consacre l’existence de la direction de la Fonction publique et renforce ses attributions. Placée sous l’autorité du président du gouvernement, et sans diminuer en rien l’autorité et les prérogatives des ministres, la direction de la Fonction publique a pour mission essentielle de veiller à l’application du Statut et d’assurer entre les services l’unité de vues  qui a tant fait défaut jusqu’alors.

5° Le Statut proclame l’égalité des sexes ; l’accès des services publics est ouvert désormais aux femmes dans les mêmes conditions que pour les hommes.

6° Le Statut apporte aux fonctionnaires les garanties positives de traitement et de retraite, les garanties de carrière qui auront pour effet de restituer tout son prestige à la fonction publique. Le traitement de début du fonctionnaire sera fixé à 120% du minimum vital. La pension d’ancienneté ne pourra en aucun cas être inférieure à ce minimum vital. La  détermination - prévue par le Statut- des parité entre  les traitements des fonctionnaires des différentes catégories de chaque administration  permettra d’établir plus d’harmonie et surtout plus de justice dans la fixation des rémunérations respectives ; elle mettra fin aux rivalités regrettables entre personnels de même qualification et parfois appartenant à une même administration. Le Statut prévoit aussi l’extension des primes de rendement individuelles et collectives qui permettront de « proportionner » la rémunération des fonctionnaires ou d’un groupe donné de fonctionnaires à l’intensité et l’efficacité de l’effort. Enfin le Statut apporte aux fonctionnaires des améliorations substantielles dans le domaine de la sécurité sociale.

    Tels sont les principes essentiels autour desquels s’ordonne l’ensemble du « Statut général des fonctionnaires » en vue d’assurer la revalorisation matérielle et morale de la fonction publique.

   Le Statut, attendu depuis si longtemps par nos fonctionnaires, animera d’un esprit nouveau tout notre système administratif. Il permettra de moderniser les structures et les méthodes. Il modifiera heureusement les rapports entre l’administration et le public en modifiant les rapports entre l’Administration et ses agents.

   Le Statut permettra aux travailleurs de la fonction publique de donner toute leur mesure, qui peut et doit être grande, à l’œuvre commune de la Renaissance française.

  

 

                     Quelques notes pour une bonne compréhension du texte

 

-  Le rapporteur du projet de loi portant statut général des fonctionnaires à l’Assemblée nationale constituante  désigné par la commission de l’Intérieur était  Yves Fagon, député MRP, ancien militant de la CFTC.

 

  - Lorsqu’il évoque les organisations syndicales de fonctionnaires, Maurice Thorez mentionne les syndicats « confédérés » et « chrétiens ». Il faut savoir qu’à cette époque existaient seulement deux centrales syndicales, la CGT et la CFTC. La Commission syndicale d’études comprenait 12 représentants des organisations syndicales  (10 CGT et 2 CFTC).

 

   - Le porte parole du groupe socialiste était Christian Pineau. Il a affirmé que le texte était « empreint d’un esprit totalitaire » et annoncé l’intention d’entreprendre « la révision de certaines de ses dispositions essentielles ». Le projet de loi a cependant été adopté à l’unanimité.

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Eléments biographiques

   En un demi siècle, j'ai fait "le tour de la table" de la politique de la fonction publique comme syndicaliste, directeur de cabinet du ministre, conseiller d'Etat en service extraordinaire, auteur d'ouvrages.

 

  Né le 2 décembre 1922 à Jurançon (Pyrénées-Atlantiques)

 

-Fonctionnaire

 Receveur divisionnaire des Impôts honoraire

 

-Dirigeant national du mouvement syndical des fonctionnaires (1958-1978)

  Secrétaire du Syndicat national des Contributions indirectes 1958-1963

  Secrétaire général de la Fédération des finances CGT 1963-1970

  Secrétaire général de l’Union générale des fédérations de fonctionnaires (UGFF) et

  Membre du conseil supérieur de la fonction publique 1970-1978

  Membre de la commission exécutive de la CGT 1969-1975.

 

  Membre du conseil d’administration de l’Institut CGT d’histoire sociale.

 

-Directeur du cabinet du ministre de la fonction publique et des réformes administratives  (juin 1981-novembre 1983).

 

-Conseiller d’Etat en service extraordinaire (novembre 1983-novembre 1987).

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