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11 décembre 2010 6 11 /12 /décembre /2010 09:31

                                       Extrait de

    La Commune de Paris telle qu’en elle-même…p 217-218

 

Dans la plupart des écrits émanant d’auteurs qui éprouvent de la sympathie à l’égard de la Commune, il est classique de mentionner deux « erreurs » essentielles du Comité central de la Garde nationale, plus ou moins considérées comme les causes  principales de l’écrasement de la Commune de Paris : la décision de ne pas marcher immédiatement sur Versailles au lendemain du 18 mars et d’organiser les élections,  celle de ne pas s’emparer des réserves de la Banque de France. On relève également la malencontreuse nomination de Charles Lullier qui a laissé les Versaillais s’emparer du Mont-Valérien, et les conséquences de cette carence sur le massacre de la sortie du 3 avril. De nombreuses autres « faiblesses », apparaissent au fil de l’analyse des événements, et nous les  avons rencontrées ici comme dans toute relation de l’histoire de la Commune. Il est bien naturel que l’on se demande ce qui serait advenu  si ces « erreurs » avaient été évitées, et que l’on se prenne à rêver à l’entrée triomphale des fédérés dans Versailles, s’emparant des bâtiments publics, contraignant à la fuite le gouvernement de Thiers et les députés à l’Assemblée nationale (les versaillais eux-mêmes n’avaient pas exclu un repli sur Bordeaux ou Tours), au retour à Paris ou à l’exil des agents publics déserteurs,  à la mainmise de la Commune sur les trésors de la Banque, et finalement à la réalisation des objectifs des communards.

Cette démarche n’est pas inhabituelle. Chacun peut  se souvenir de s’y être engagé à propos de tel événement historique et d’avoir mentalement réécrit l’histoire avec des si. « L’uchronie », mot peu usité désignant une conception de l’histoire prétendant  la reconstruire  non d’après les faits réels, mais d’après un enchevêtrement possible des faits, a selon Jean-Noel Jeanneney 5 « beaucoup à nous dire quant à l’imbrication compliquée des temporalités.»  Cet auteur s’interroge : « Que serait-il arrivé si Brutus n’avait pas osé, si Ponce Pilate avait dit non, si le poignard de Ravaillac avait glissé, si Nelson avait perdu Trafalgar, si Grouchy était arrivé avant Blücher à Waterloo, si la bombe d’Orsini avait tué Napoléon III, ou  celle du  20 juillet 1944 Adolf Hitler ? » Citant un ouvrage de Eric Henriet 6, il remarque que ces thèmes, choisis parmi tant d’autres, ont tous été traités  dans Les Annales des lettres françaises entre juillet 1956 et août  1957, respectivement par Jérôme Carcopino, le R.P.Riquet, le duc de Lévis Mirepoix, Fleuriot de Langle, René Floriot,  Adrien Dansette  et Jean Mistler. « En réalité, dit-il, l’exercice n’est intéressant, au-delà du piquant du jeu, que parce que soustraire ainsi un fait de la trame des événements, c’est réfléchir aux mouvements lents qui auraient, de toute façon, continué d’être au travail. »

S’agissant de la Commune de Paris, qui peut affirmer, en effet,  que l’issue eut été différente, en négligeant l’essentiel, c’est-à-dire les « forces profondes », les conditions générales de l’époque, les rapports de force à l’échelle du pays, l’occupation d’une grande partie du territoire par les troupes prussiennes ?

 

5 -Jean Noël Jeanneney  L’histoire va-t-elle plus vite ? Gallimard 2001.

6 -Eric Henriet, L’histoire revisitée ; panorama de l’uchronie sous toutes ses formes, Amiens Encrage, 1999.

                                                   

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9 décembre 2010 4 09 /12 /décembre /2010 07:20

                                         A. Gramsci

 

 

                                                          Extrait de

René Bidouze, La Commune de Paris telle qu’en elle-même Une révolution sociale aux avant-postes de la République et des libertés municipales 

Réédition 2009, Le temps des cerises (p 201-203)

            .

Qui est Antonio Gramsci (1891 - 1937) ?


    Quatrième des sept enfants d’une famille très modeste, il a travaillé dès l’âge de onze ans, puis il a poursuivi des études secondaires, obtenu une bourse, s’est  inscrit aux facultés de lettres et de droit. Il a pris ses premiers contacts avec  le mouvement socialiste italien avant la Première Guerre mondiale, et a eu, au long des années suivantes, une grande activité dans le journalisme politique. Arrêté en 1919, il fut en 1921 l’un des fondateurs du Parti communiste italien, directeur de son organe devenu quotidien,  Ordine nuovo. Elu député en 1924, alors que l’Italie était sous le régime fasciste, il fut arrêté en 1927 et condamné à vingt ans de réclusion. De 1929 à 1936, il rédigea ses Cahiers. Gravement malade, il obtint une réduction de peine, puis fut libéré en 1937. Mais il mourut quelque temps après, frappé par une hémorragie cérébrale. Théoricien marxiste, Gramsci a élaboré des concepts et développé des analyses subtiles et originales sur la Révolution et les questions de l’Etat. Son œuvre a donné lieu à des interprétations contradictoires et à des controverses dans le mouvement communiste international.

 

Voir Marie Antonieta Macciocchi, Pour Gramsci, Editions du Seuil, 1974

 

 

   On ne rencontre pratiquement jamais, dans les études générales sur la Commune de Paris, même dans celles qui font une place plus ou moins large aux écrits de Marx, les analyses d’Antonio Gramsci.

   Ce penseur, rejetant le dogmatisme, a avancé des concepts nouveaux  tels que « hégémonie », « société civile » et « société politique », « bloc historique », « catharsis », dont le maniement est particulièrement subtil et complexe, mais qui n’occupent pas la place qu’ils méritent dans la littérature marxiste. Ses travaux furent  pratiquement frappés d’interdit par les idéologues soviétiques.

   L’application qu’il a faite de ces concepts  aux événements qui se déroulèrent en France de 1789 à 1870  présente  pourtant un incontestable intérêt, car elle éclaire la place de la Commune de Paris dans ce processus historique. Gramsci  a déduit de son étude que « ce n’est qu’en 1870-1871, avec l’expérience de la Commune, qu’arrive à son dénouement historique tout ce qui, en 1789, n’était qu’à l’état de germe… » Il  note qu’au cours  de cette  longue période jalonnée par 1789, 1794, 1799, 1804, 1815, 1830, 1848, 1870, se sont succédé en France des crises, des bouleversements sociaux et politiques qui se sont déroulés jusqu’à l’instauration d’un nouvel équilibre entre les forces antagonistes. Et il constate que d’une part, la bourgeoisie a été capable d’assurer sa domination idéologique, et que d’autre part, elle a ouvert des périodes de « stabilisation » de plus en plus longues, en contrôlant de mieux en mieux la « société civile », comme le montre l’énumération des dates  retenues.

   En 1871, la bourgeoisie, comprenant  que son « hégémonie » était menacée, et qu’un divorce entre « société civile » et « société politique » risquait  de  modifier les bases de la direction de l’Etat, a sauvagement réprimé le mouvement communal.

   C’est avec l’écrasement de la Commune, pense cet auteur, que s’est achevée la crise organique ouverte par la Révolution de 1789. Il constate que les contradictions internes de la structure sociale n’ont trouvé leur équilibre relatif qu’avec la IIIe République donnant à la France « soixante ans de stabilité politique », et il considère, notamment pour cette raison, que l’expérience historique de la Commune de Paris est « d’une valeur inestimable. »

   L’application des concepts avancés par Gramsci  à cette longue période de l’histoire de France le conduisait à une  réflexion pertinente : avant même de conquérir l’Etat, la Révolution française de 1789 avait été préparée par le « siècle des Lumières » diffusant une nouvelle conception idéologique opposée à celle de l’aristocratie, pénétrant jusque dans les campagnes, et jetant ainsi les bases  de la conquête de la « société politique » par le nouveau « bloc historique. »

    C’est bien la crise de l’hégémonie adverse qui prépare les conditions de la prise du pouvoir. Un groupe social, pense Gramsci, peut, et même doit s’imposer comme dirigeant, avant même la prise du pouvoir, en se ménageant le consensus des « groupes sociaux et alliés ». Même si la Commune de Paris a su assumer tout à la fois les intérêts des ouvriers et ceux de la petite bourgeoisie parisienne, elle était coupée de l’ensemble de la France rurale, et n’a pu vaincre l’hégémonie de la bourgeoisie. De ce point de vue, la situation de la France en 1871 n’était pas celle de 1789…

     On est en droit de penser que c’est principalement  en ce sens que « la Commune n’est pas morte », tout en admettant qu’on puisse évoquer cette formule par référence à des considérations relevant d’un certain « romantisme révolutionnaire ». 

 

 

 

 

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8 décembre 2010 3 08 /12 /décembre /2010 09:15

  La publication d’extraits de l'ouvrage La Commune de Paris telle qu'en elle-même est une contribution qui se veut singulière à la célébration du 140e anniversaire de la Commune de Paris qui donnera lieu à un grand nombre d’initiatives de l’Association des Amis de la Commune en 2011.                         

                              (voir le site www.commune1871.org).

      

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6 décembre 2010 1 06 /12 /décembre /2010 09:24

 

    Une idée simple, qu’on pouvait émettre dès le premier jour, mais qui comme toutes les vérités d’évidence met  parfois du temps à s’imposer, semble maintenant faire son chemin : la RGPP, caractérisée avant tout par le non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, et que certains  identifient par la formule du « un sur deux », fait de plus en plus de ravages dans les services publics parce qu’elle relève d’une vision  « comptable » et aveugle. Je suis certainement loin d’avoir eu connaissance de tout ce qui a été  dit ou écrit à ce sujet au cours de ces trois dernières années. Je reste sur le terrain de l’histoire et du témoignage en portant néanmoins un retard critique et souvent affligé sur l’actualité. On va donc rappeler (car telle est la vocation de ce blog) quelques  éléments  tirés de l’histoire de la politique de l’emploi public. La fonction publique n’a pris naissance ni avec le tandem Sarkozy-Fillon ni avec  les politiciens  et les technocrates qui le servent.

 

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5 décembre 2010 7 05 /12 /décembre /2010 09:53

La Commune

   

Seront très prochainement insérés ici trois  extraits de l’ouvrage La Commune de Paris telle qu’en elle-même :

-Antonio Gramsci et la Commune

-La Commune et la culture politique du peuple français

-Au royaume de l’uchronie ?

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3 décembre 2010 5 03 /12 /décembre /2010 11:50

                                  

                                        Cet article a été publié dans

                       Les Cahiers de l’Institut CGT d’histoire sociale

                                          n° 115 septembre 2010

 

 Le débat sur  l’utilité de la connaissance historique, sur ses rapports avec le combat social d’aujourd’hui et sur l’autonomie de la recherche par rapport à l’action politique et syndicale trouve  dans les évolutions  de la fonction publique des illustrations significatives. La discussion ouverte, sur fond d’instrumentalisation de l’histoire, à propos du statut et du contrat révèle en particulier les enjeux de conception de la fonction publique.

 

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2 décembre 2010 4 02 /12 /décembre /2010 08:48

Quelques jalons d'histoire: "la "question sociale"

 

   Comme suite à l’article sur la Commune de Paris dans la genèse du ministère du Travail, quelques jalons complémentaires  de l’histoire  sociale.

 

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26 novembre 2010 5 26 /11 /novembre /2010 09:26

   Dans ce blog, sont insérés principalement des articles traitant de l’histoire de la Fonction publique et du syndicalisme des fonctionnaires. Mais comme il était annoncé au départ, une place y est faite à la Commune de Paris. Voici donc la reprise d’un article que j’ai publié dans le bulletin des Amis de la Commune de Paris 1871 en 2006, à l’occasion du centenaire de la création du ministère du Travail.

   Cet article servira de préambule à des notes concernant les caractéristiques distinctes et les interférences du droit de la fonction publique et du droit du travail, en un  moment où certains s’emploient à diluer le premier dans le second, l’un et l’autre sérieusement malmenés.

 

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24 novembre 2010 3 24 /11 /novembre /2010 06:51

    J’ai inséré dans ce blog  en septembre,  des articles concernant l’état de la recherche dans le domaine de l’histoire du syndicalisme général des fonctionnaires en souhaitant qu’elle suscite de nouvelles vocations. Ce chantier reste en effet largement ouvert. 

   J’ai également souligné que cette histoire générale pourrait impliquer des recherches portant sur les associations constituées au début du XXe siècle, transformées ensuite en syndicats nationaux dotés de sections locales ou départementales dans les différentes administrations de l’Etat. Il s’est trouvé ici et là des militants- ou des étudiants- qui ont eu à cœur de rassembler les archives, de rédiger des notes, d’établir des monographies.

     Dans l’immédiat, il serait utile d’en dresser un recensement, une bibliographie permettant d’aller plus loin dans  une  recherche qui ne manque pas de perspectives.

     Pour cela il serait souhaitable  que des bonnes volontés se manifestent et se regroupent dans un travail collectif d’équipe.

    

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20 novembre 2010 6 20 /11 /novembre /2010 14:20

                                                Article publié dans

                        les Cahiers de l’Institut CGT d’histoire sociale

                                           n ° 107 septembre 2008

 

De par leur caractère interprofessionnel, les négociations  de Grenelle ont été, comme il se devait, au cœur du 40e anniversaire de Mai 1968. Mais d’autres négociations nationales, dont on n’a guère parlé, se sont déroulées concomitamment à Grenelle  ou dans les jours qui ont suivi. Parmi elles figure la discussion au sein de la fonction publique, qui a débouché sur d’importants résultats. D’aucuns ont qualifié ces négociations de « Grenelle de la fonction publique », ce qui, après le Grenelle de l’environnement, suggère une large confrontation sur un sujet majeur 1.

 

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Eléments biographiques

   En un demi siècle, j'ai fait "le tour de la table" de la politique de la fonction publique comme syndicaliste, directeur de cabinet du ministre, conseiller d'Etat en service extraordinaire, auteur d'ouvrages.

 

  Né le 2 décembre 1922 à Jurançon (Pyrénées-Atlantiques)

 

-Fonctionnaire

 Receveur divisionnaire des Impôts honoraire

 

-Dirigeant national du mouvement syndical des fonctionnaires (1958-1978)

  Secrétaire du Syndicat national des Contributions indirectes 1958-1963

  Secrétaire général de la Fédération des finances CGT 1963-1970

  Secrétaire général de l’Union générale des fédérations de fonctionnaires (UGFF) et

  Membre du conseil supérieur de la fonction publique 1970-1978

  Membre de la commission exécutive de la CGT 1969-1975.

 

  Membre du conseil d’administration de l’Institut CGT d’histoire sociale.

 

-Directeur du cabinet du ministre de la fonction publique et des réformes administratives  (juin 1981-novembre 1983).

 

-Conseiller d’Etat en service extraordinaire (novembre 1983-novembre 1987).

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