Sur ce sujet, voici un extrait de mon ouvrage Les fonctionnaires sujets ou citoyens Tome 2 1981 (pages 135-136) :
Le soir même de l’investiture du général de Gaulle comme Président du conseil, la commission administrative de la CGT stigmatise le vote de l’Assemblée nationale. Elle en dénonce les dangers et appelle les travailleurs à l’union et à l’action. La CGT est informée par un coup de téléphone du cabinet du président du conseil que ce dernier désire recevoir une délégation du bureau confédéral. Le 3 juin, cette invitation est confirmée par lettre. La CA de la CGT se réunit aussitôt et après une large discussion, décide de décliner cette invitation, pour éviter d’apporter au nouveau pouvoir la caution qu’il recherche. Votent pour l’acceptation de l’invitation Le Brun, Rouzaud, Berteloot, Ehni 1
La Tribune des fonctionnaires de mai-juin 1958 précise « qu’il n’y a aucune divergence sur l’orientation générale de la CGT, aucun désaccord sur les problèmes de fond que pose la venue au pouvoir du général de Gaulle. Les différences d’appréciation ont porté essentiellement sur une question de tactique. »
Les autres centrales se rendent à la convocation. Dans une conférence de presse du 13 juin, M. Pinay déclare « Les syndicalistes que le président du conseil a reçus sont très raisonnables. »
La Vie française du même jour écrit : « … Le général de Gaulle a rassuré tout un secteur ouvrier qui ne demandait d’ailleurs qu’à l’être. Dans une première série d’entretiens, le président du conseil n’a pas dévoilé ses batteries. Il a plutôt voulu, par une prise de contact directe, connaître ses interlocuteurs dont il voudrait éviter qu’ils deviennent des adversaires… Il a donné assez d’assurances au deux grandes centrale syndicales pour gagner trois mois de paix sociale. »
Le CCN de la CGT, réuni les 11 et 12 juin, adopte à l’unanimité une déclaration qui se conclut ainsi : « il faut dire non au pouvoir personnel, non à la dictature, il faut intensifier la lutte pour la paix en Algérie ; cette paix ne peut se réaliser que par des négociations, en tenant compte des légitimes aspirations nationales du peuple algérien ».
Le bureau de l’UGFF publie un texte intitulé « Le combat continue » dénonçant le « chèque en blanc signé par le Parlement sous la contrainte militaire et la menace de la guerre civile ». Dans le même temps il rappelle les revendications des fonctionnaires à M. Pinay, ministre des Finances, et demande au directeur général de la Fonction publique de lever la discrimination dont l’UGFF est l’objet dans la « commission d’harmonisation ».
1-Ces quatre militants sont dans la minorité confédérale. Le Brun, secrétaire confédéral est gaulliste. André Berteloot, secrétaire confédéral est secrétaire général de l’UGFF. Léon Rouzaud, membre de la CA de la CGT a été secrétaire général de l’UGFF. En 1958, il est secrétaire général du Syndicat des Indirectes. Ehni est secrétaire général de la Fédération du Livre.