Le thème de la réforme de l’Etat, est, comme celui de la réforme administrative, de toutes les époques. Mais dans les dernières décennies du XXesiècle, ce thème a occupé une place particulière dans la politique générale de la Fonction publique.
Traditionnellement, le secrétaire d’Etat ou le ministre de la Fonction publique était en charge des réformes administratives. Dans les années 1990, on a vu apparaître dans les attributions de ce ministère la décentralisation, la modernisation, l’aménagement du territoire, la réforme de l’Etat.
Après le quinquennat calamiteux de Nicolas Sarkozy, dont il faudra réparer les dégâts, un ministère chargé de la Réforme de l’Etat, de la Décentralisation et de la Fonction publique est constitué dans le gouvernement de Jean-Marc Ayrault.
Dans ce nouveau contexte, il n’est pas sans intérêt de connaître ou de se remémorer les principaux textes qui ont jalonné la politique dite de « réforme de l’Etat » dans les années qui ont précédé ce quinquennat. On trouvera ci-dessous un extrait de l’ouvrage L’Etat et les fonctionnaires ( à consulter sur le site Calaméo).
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Les années 1980 ont connu une offensive libérale dénonçant « L’Etat-providence », le « trop d’Etat » ou « L’Etat obèse », exaltant le « management », les vertus du « marché » et de l’entreprise privée. Puis on a glissé vers le « mieux d’Etat », « L’Etat-stratège », « L’Etat-rassembleur ». Dans la politique dite de « renouveau des services publics » des années Rocard, on a annoncé le « retour de l’Etat » la « réhabilitation du service public ». Avec les années Chirac, Balladur et Juppé en 1986, 1993 et 1995, ce fut le retour des privatisations qui eut lieu et les années Jospin ont connu encore plus d’« ouvertures de capital » que celles de ses prédécesseurs.
La transformation des services administratifs en établissements publics administratifs (EPA) d’EPA en établissements publics industriels et commerciaux (EPIC), d’EPIC en sociétés d’économie mixte (SEM), de SEM en sociétés anonymes qui sont des organismes privés, les délégations de service public, la création d’autorités administratives indépendantes, sont engagées d’assez longue date, et le traité de Maastricht, en renforçant le concept d’économie de marché, a accentué la pression sur la conception française du service public
Dans la période des gouvernements Rocard - Cresson- Bérégovoy, les questions relatives à l’organisation administrative sont apparues d’une façon de plus en plus systématique dans la politique de la fonction publique, avec notamment l’institution des projets de service et des centres de responsabilité. Dans les années suivantes la « réforme de l’Etat » est passée au premier plan.
En octobre 1991, au cours d’une réunion du CIAT, le gouvernement a annoncé des « délocalisations » impliquant au total 15.000 emplois: l’Ecole nationale d’administration à Strasbourg, la SEITA à Angoulême, l’Office national des forêts à Bourges.
Un dispositif d’évaluation des politiques publiques comportant un Comité interministériel de l’évaluation (CIME) et un conseil scientifique a été organisé par le décret n° 90-82 du 22 janvier 1990. En 1992 une charte des services publics, qui n’était ni le premier ni le dernier texte se donnant pour objectif d’améliorer le service aux usagers, thème éternel de l’administration était publiée. Les commissions des Xe et XIeplans présentaient diverses propositions. Le Comité central d’enquête sur le coût et le rendement des services publics (un organisme créé par un décret du 8 avril 1975 modifié le 14 mars 1996 et codifié dans la partie réglementaire du code des juridictions financières) évaluait le coût des formalités administratives et procédait à des séries d’enquêtes sur divers sujets. Les travaux de codification des textes législatifs et réglementaires étaient poursuivis et amplifiés sous l’impulsion d’organismes tels que le centre d’enregistrement et de révision (CERFA) la commission pour la simplification des formalités ( COSIFORM).
La loi du 6 février 1992 sur l’administration territoriale de la République définissait une nouvelle répartition des missions de l’Etat entre administrations centrales et services déconcentrés fondée sur le principe de subsidiarité. Le décret du 1er juillet 1992 portait une charte de la déconcentration, présentée comme le principe de droit commun des interventions de l’Etat et redéfinissait le rôle et la composition du comité interministériel pour l’administration territoriale (CIATER). La loi du 29 janvier 1993 relative à la transparence et à la régularité des procédures publiques dite « Loi Sapin » consacrait la « délégation de service public » expression nouvelle recouvrant une réalité ancienne. Une circulaire du 26 août 1994 prévoyait diverses mesures destinées à « décloisonner » les corps des administrations centrales et des services déconcentrés, une circulaire du Premier ministre Alain Juppé en date du 26 juillet 1995 engageait un « plan triennal de réforme de l’Etat ». Elle annonçait notamment la diminution du nombre des corps de fonctionnaires et le développement des dispositions statutaires communes, la déconcentration de la gestion des carrières, des dispositions concernant l’accès aux emplois publics, la mobilité, l’encadrement supérieur. Dans le domaine des rémunérations, elle prescrivait une meilleure prise en compte des responsabilités exercées et des résultats obtenus grâce à de nouvelles méthodes de notation et d’évaluation individuelle. Par une lettre de mission en date du 31 janvier 2006, Christian Jacob ministre de la fonction publique dans le gouvernement de Villepin demandait au Comité d’enquête sur le coût et le rendement des services publics d’examiner le système de notation et d’évaluation - qui malgré ses défauts permettait en principe d’allonger ou de réduire les durées d’avancement d’échelon en fonction de la valeur professionnelle de l’agent - avec pour objectif la suppression de la notation et la référence aux pratiques du secteur privé. Le ministre confirmait ainsi la perspective de la suppression des corps et de l’abandon du système de la carrière.
Le décret n° 95-1007 du 13 septembre 1995 instituait le Comité interministériel pour la réforme de l’Etat et un Commissariat à la réforme de l’Etat dont les représentants devaient siéger avec ceux des ministères concernés dans un comité permanent chargé de déterminer une série d’orientations, soumises en avril 1996 à la commission de modernisation du Conseil supérieur de la fonction publique de l’Etat. Un groupe de travail était constitué avec les organisations syndicales, et le 29 mai 1996, le comité interministériel arrêtait un ensemble de mesures.
Le gouvernement Lionel Jospin poursuivait la politique engagée par le gouvernement précédent. En novembre 1997, il fixait les orientations qui devaient être mises en œuvre par le comité interministériel. Le décret n° 98-573 du 8 juillet 1998 créait la Délégation interministérielle à la réforme de l’Etat. Le décret n° 2000-663 du 13 juillet 2000 créait un Observatoire de l’emploi public, installé le 19 septembre 2000.
Une commission permanente de modernisation des services publics réorganisée en 1999 a connu sa première année pleine de fonctionnement en 2000. Cette commission consultative, présidée par le ministre de la fonction publique et de la réforme de l’Etat, était composée pour moitié de représentants syndicaux et pour moitié de représentants d’associations d’usagers et de l’administration.
Les préfets ont été invités par une circulaire conjointe des ministres de l’Intérieur et de la fonction publique à créer des commissions locales interministérielles de coordination.
Un décret du 21 février 2003 créait trois nouvelles entités : la Délégation à la modernisation de la gestion publique et des structures de l’Etat (DMGPSE), la Délégation aux usagers et aux simplifications administratives, l’Agence pour le développement de l’administration électronique (ADAE).
Parmi les textes qui jalonnaient cette politique, on peut citer notamment la loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l’organisation décentralisée de la République, le décret n° 2004-974 du 20 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets et à l’action des services de l’Etat dans les régions et les départements.
Dans les années 1990, la décentralisation, la modernisation, l’aménagement du territoire, la réforme de l’Etat ont été inclus dans les attributions du ministère de la Fonction publique. Mais en 2005 la réforme de l’Etat était placée sous la responsabilité du ministère chargé du Budget qui lançait une première vague de dix-sept audits en octobre 2005 suivis de dix-neuf autres au début de l’année 2006 en vue de déterminer les réductions de dépenses possibles dans différentes administrations de l’Etat.
La loi organique relative aux lois de finances ( Lolf)
La loi du 1er août 2001 initiée par le gouvernement de Lionel Jospin et sa majorité parlementaire de gauche a été votée à la quasi unanimité par l’Assemblée nationale. Les députés communistes se sont abstenus et les organisations syndicales ont émis des réserves. Entrée en vigueur au 1er janvier 2006, cette réforme de la procédure budgétaire, qui vise à accroître le rôle du Parlement, est la plus vaste et la plus ambitieuse que notre pays ait connue.
Elle est d’une grande complexité. Le budget de l’Etat est présenté par « missions » ministérielles et interministérielles et non plus par ministères. Chaque mission comprend plusieurs « programmes » dotés d’un « projet annuel de performance » mesuré par des « indicateurs » et divisé en « actions ».Les responsables sont bénéficiaires d’une liberté de gestion dite « asymétrique »désignée sous le vocable « principe de fongibilité des crédits ».