Il m’est arrivé de citer une réflexion de Jean-François Revel, écrivain et journaliste décédé en 2006, dont je ne partageais pas les idées politiques, mais dont personne ne peut nier l’autorité et la très grande expérience, animées d’un humour caustique :
« Quand on veut deviner aujourd’hui en France quels auteurs précédents ont le plus nourri un nouveau livre, il n’est que de regarder la bibliographie ; ce sont ceux qui n’y figurent pas. Outre les plagiaires stricto sensu, qui ont prospéré au grand jour sans endurer de discrédit durable, on a vu proliférer dernièrement les pique-assiettes et les voleurs à la tire, servis par l’amnésie des médias. »1.
Une telle réflexion ne pouvait émaner que d’un auteur reconnu dont les œuvres pouvaient susciter un certain pillage.
Il est d’autres observations que le commun des mortels peut faire au fil de ses lectures et des sentiments divers et contradictoires qu’elles inspirent. Ainsi certains auteurs accompagnent leurs publications d’une impressionnante quantité de Notes dont une analyse quelque peu critique ne manquerait pas d’être révélatrice. D’autres sont pratiquement muets sur leurs sources. D’autres encore oublient de citer les auteurs qui les gênent pour des raisons généralement inavouables ou illustrent leurs commentaires par des formules plus ou moins symboliques dont ils s’attribuent indûment la paternité. Quant aux diverses formes de « l’info - spectacle », elles prennent de telles proportions que plusieurs ouvrages récents de chercheurs leur sont consacrées sous des titres évocateurs de « La cérémonie cannibale » au « storytelling » et au « formatage » des esprits.
Les questions qui nous intéressent ici y sont sévèrement malmenées quand elles ne sont pas simplement ignorées.
1- Jean François Revel, Mémoires, Le voleur dans la maison vide, Plon 1990(Page 687).